Cet article s’adresse principalement aux Français qui arrivent trop souvent au Québec avec des idées préconçues et finalement retournent en France après 2 ans.
Mon premier conseil est que les Français doivent comprendre qu’ils sont des immigrés au Québec et que personne ne les attend pour venir sauver le Québec. La vie est bien différente même s’il existe des similitudes avec la France, tout n’est pas toujours rose comme dans toutes sociétés.
La société québécoise
Il est important de connaître la société dans laquelle on souhaite venir s’installer afin d’éviter les surprises. La réunion d’information de la Délégation Générale du Québec ne suffit pas. Pour ce faire, je vous conseille de lire quelques ouvrages sur son histoire1, sa politique étrangère2 et son questionnement face à la langue française3. Il existe une librairie à Paris qui est exclusivement dédiée au Québec4 (histoire, roman, poésie, politique, nature, voyage…).
Ensuite, la production cinématographique est très riche et active au Québec. C’est souvent une bonne source d’information pour connaître les nouvelles interrogations d’une société. Par exemple, Camping Sauvage, Ma fille mon ange, Bon cop Bad cop, 1870, nez rouge, les Invasions barbares, la Grande Séduction… ces films permettront d’avoir un aperçu de la nouvelle réalité québécoise et de ses interrogations.
Finalement, rien ne peut remplacer le contact humain. En France, l’association France-Québec5 est une référence. Elle vous permettra de rencontrer soit des québécois installés en France depuis longtemps, des étudiants en stage ou des français qui ont vécu l’expérience québécoise. Au Québec, Accueil Français de Québec (AFQ)6 est une association qui a pour objectif de renseigner et diriger les nouveaux candidats à l’immigration, elle pourra vous donner beaucoup d’information et surtout faire tomber les mythes.
Système social québécois
Le système québécois se situe à mon avis entre le système social français et le système capitaliste étatsunien.
Les soins de santé sont gratuits (sauf pour les lunettes et les dents) et les Français peuvent en bénéficier immédiatement en demandant la « carte soleil ». Les médicaments sont généralement couverts à 80% avec une bonne assurance (publique ou privée). Le seul problème est la pénurie de médecin ce qui peut poser un souci pour avoir un médecin de famille (obligatoire pour pouvoir consulter des médecins spécialistes) en titre. Il n’est pas rare d’être refusé lorsque l’on se pointe à des journées sans rendez-vous car la clinique ne prend plus de nouveaux clients. Les hôpitaux sont débordés, on peut attendre plusieurs heures avant d’être pris en charge. Les pharmacies de garde n’existent à ma connaissance.
Le Québec dispose aussi d’un organisme d’accompagnement pour le retour à l’emploi : Emploi-Québec. Il est possible d’avoir 70% de son salaire pendant 6 mois avec un salaire annuel brut maximal de 55 000$. Pour avoir le droit aux indemnités, il faut avoir cotisé pendant 6 mois donc on oublie en arrivant sur place. Néanmoins, pour faciliter l’employabilité des nouveaux arrivants, il est possible dans certains cas de faire exonérer son premier employeur des charges sociales pendant un an. Pour les étudiants possédant un doctorat, il est possible d’être exonéré d’impôts provinciaux pendant 5 ans (100% les 2ières années, 75% la 3ième, 50% la 4ième et 25% la 5ième). Pour les gens qui se retrouvent sans revenu il existe le Bien-Être Social (BS) qui est l’équivalent du RMI.
Il existe plusieurs professions qui sont régies par des Ordres Professionnelles qui sont les seules à donner un permis de travail ou non. Il est IMPORTANT de se renseigner avant de venir et surtout de savoir comment les reconnaissances se font. Si on fait la demande à son arrivée on peut attendre entre 6 et 12 mois pour obtenir ce permis … CELA SIGNIFIE QU’ON NE PEUT PAS TRAVAILLER DANS CE LAPSE DE TEMPS DANS CE SECTEUR, à quelques exceptions près. Il est aussi important d’avoir ses bulletins de notes car les diplômes ne suffisent pas pour faire reconnaître une formation. LE FAIT DE VENIR de France NE VOUS DONNE AUCUNE PRIORITÉ OU AUCUN TRAITEMENT DE FAVEUR… SANS NOTE, SANS DIPLOMES, SANS PROGRAMME DETAILLÉS PAS DE PERMIS DE TRAVAIL ET DONC PAS D’EMPLOI. Les reconnaissances automatiques sont très rares. LA RECONNAISSANCE DE VOS DIPLOMES PAR LE GOUVERNEMENT DU QUEBEC NE VOUS ASSURE PAS D’ÊTRE RECONNU PAS LES ORDRES. Dans certains cas, il faudra prévoir de passer des cours supplémentaires pour valider ses acquis. Il est très conseillé d’entreprendre ces démarches de reconnaissance avant d’arriver sur place.
Les impôts sont directement prélevés sur vos salaires et se divisent entre le provincial (le plus cher) et le fédéral. Il faut néanmoins remplir une déclaration avant le 31 mars à chaque année. Les prix sont affichés sans les taxes qui sont de 6% pour la TPS (fédérale) et 7,5% pour la TVQ (qui s’applique aussi sur la TPS…). Lorsque vous allez dans un bar ou restaurant le salaire de la serveuse ou du serveur n’est pas compris. On ajoute au montant généralement l’équivalent des taxes. NE JOUEZ PAS VOS MAUDITS FRANÇAIS ET RESPECTEZ LE TRAVAIL DES AUTRES EN LAISSANT CE POURBOIRE.
Travailler au Québec
Tout d’abord il faut refaire son CV en indiquant les équivalents de vos diplômes (Licence = Bac au Québec, Master en bon français = Maîtrise au Québec). Au Québec l’expérience professionnelle est bien plus importante que vos diplômes, il faut donc la mettre en avant dans votre CV. Lors de vos entretiens, on cherchera à savoir ce que vous allez apporter à l’entreprise concrètement et non pas ce que vous avez fait… SVP ne vous prenez pas pour un dieu en envoyant votre CV en anglais… la langue officielle du Québec est uniquement le français. Ne vous inquiétez pas votre niveau sera testé pendant l’entretien si cela est requis.
Les relations au travail sont différentes et vous serez jugés sur vos réalisations et vos succès. Le tutoiement est de mise mais attention on tutoie son directeur de département mais pas celui d’un autre département ou le VP de la compagnie. On dit bonjour le matin en arrivant mais on évite d’aller faire la bise aux femmes et de serrer la main à tout le monde. Évitez de venir dire à tout bout de champs qu’on fait comme ça en France en critiquant la manière de faire de vos collègues car très vite vous allez les fatiguer ou les énerver…
Il est préférable de privilégier la recherche d’emploi en région où le chômage est souvent moins important qu’à Montréal (8,7% en 2007). La ville de Québec est en pleine expansion avec un taux de chômage de 4,3% en 2007. Ne vous limitez pas seulement à la métropole mais profitez de vos affinités culturelles pour aller en région…
Pour les salaires ne soyez pas trop gourmant au départ. Renseignez vous sur les salaires habituels dans votre branche. Généralement les Français pensent que les salaires au Québec sont incroyables mais cela n’est pas le cas, redescendez sur terre. De plus, le plus important au départ est d’obtenir une première expérience québécoise donc soyez prêt à travailler pour un peu moins d’argent au début. Si vous faites l’affaire, les promotions seront très rapides.
Pour vous aider dans vos démarches vous pouvez contacter le Ministère de l’Immigration et des Communautés culturelles ou des associations locales mais attention, on ne cherchera pas l’emploi pour vous. Un excellent moyen de s’intégrer et de trouver un emploi est de faire du bénévolat dans des associations de quartier.
Vivre au Québec
Il faut s’attendre à 4 ou 5 mois de neige dans l’année et quelques tempêtes durant l’hiver. Il ne faut pas s’inquiéter, on s’y fait très facilement à condition d’aimer les activités d’hiver (ski, raquette, etc.).
Les agences de location d’appartement n’existent pas au Québec. La majorité du temps vous aurez à transiger directement avec le propriétaire. La notation F5 n’existe pas, au Québec on parle de 51/2 = 5 pièces (dont la cuisine) et une salle de bain. Il faudra vous habituez à entendre vos voisins car l’isolation phonique est moins bonne qu’en France… le mieux est d’habiter au dernier étage et d’avoir un mur mitoyen en béton.
Le système bancaire est composé de banques (BMO, RBC) et de caisses populaires (Desjardins) qui sont les plus populaires auprès des Québécois. Je comparerais les caisses au Crédit Agricole en France… Vous n’aurez pas le droit tout de suite à une carte de crédit (VISA ou MasterCard) et il faudra voir pour une marge de crédit (équivalent d’un droit de découvert). De plus, on vous demandera votre preuve de résidence pour vous permettre d’ouvrir un compte. Au Québec toutes les opérations sont payantes (paiement, retrait d’argent, virements) mais des forfaits existes. Les chèques sont à bannir de vos habitudes. Prenez le temps de vous renseigner sur les REER (retraite) car vous devrez y penser si vous ne voulez pas mourir de faim pendant vos vieux jours.
La gastronomie québécoise est certainement la plus diversifiée d’Amérique du Nord. Il est possible de trouver un large choix de fromages non pasteurisés, d’alcools locaux (cidre, apéritifs, bières). Il y a beaucoup d’éleveurs qui cherchent à revenir à des méthodes de production traditionnelle. Le meilleur marché se trouve à Montréal (Marché Jean Talon), il est malheureusement difficile de retrouver autant de choix en région mais il y a généralement quelques producteurs locaux dans les marchés en région (Ste-Foy et Vieux Marché à Québec, le marché du Vieux-Port à Chicoutimi…). Si l’on cherche un peu, on peut trouver ce que l’on veut au Québec ce qui n’est vraiment pas le cas dans le Canada anglophone.
Les alcools sont un monopole d’état et sont vendus par la Société des Alcools du Québec (SAQ) qui en profite pour s’en mettre plein les poches. Le pire est qu’ils ne soutiennent même pas les producteurs locaux… L’avantage, c’est le large choix qu’on peut y trouver surtout dans les SAQ Sélection.
A part à Montréal, les transports en commun sont peu nombreux au Québec et souvent inefficaces… Bienvenu en Amérique du Nord ;) la voiture est de mise et les joies du déneigement d’hiver aussi.
Si vous souhaitez devenir propriétaire je vous conseille d’attendre 2 ans afin d’être sûr d’y rester. Les maisons sont moins chères qu’en France mais elles sont en bois, ne possèdent pas de volets (mystère nord américain non résolu à ce jour). Il est fortement conseillé de faire une expertise avant d’acheter et de se renseigner sur le système. Je ne peux en dire plus car c’est ma prochaine étape d’intégration.
Pour les enfants en bas âge, il existe des garderies publiques à 7 $ la journée (repas compris) ce qui est unique au Canada, attention, les places sont limités et nombre de familles sont obligés de recourir à des garderies privés et évidemment plus chères (même si un crédit d’impôt est accordé). Il est fréquent que les futurs parents réservent une place en garderie subventionné avant même d’avoir conçu l’enfant. Le congé de maternité pour les femmes est de pratiquement 1 an avec entre 70% et 50% de son salaire et de 5 semaines pour le père7. Il est possible que la mère transfert des mois au père.
L’éducation au Québec est majoritairement FRANCOPHONE et très certainement la moins onéreuse d’Amérique du Nord (Canada inclus). Il faut compter environ 10 000$ par année universitaire. Les grandes universités sont : l’Université de Montréal, le réseau d’Université du Québec dans les régions et l’Université Laval. Il existe deux grandes universités anglophones : Concordia et Mc Gill.
[1]« Canada Québec » http://corsenap.canalblog.com/archives/2005/04/22/454719.html
[2] « Québec otage de ses alliés » http://corsenap.canalblog.com/archives/2005/04/22/454871.html
[3] « Lettre ouverte aux français qui se croient le nombril du monde » http://unoeilsurlequebec.blogs.letelegramme.com/tag/Denise+Bombardier
[4] http://www.librairieduquebec.fr/
[5] http://www.france-quebec.org
[6] http://afquebec.ca/AFQ/Accueil.html
[7] http://www.rqap.gouv.qc.ca/tableau/tableau-synthese.asp